Le saviez-vous – Ich bin ein berliner

En pleine Guerre froide, le Président américain John Fitzgerald Kennedy décide de se rendre à Berlin-ouest afin d’apporter aux habitants le soutien des États-Unis d’Amérique. Il y prononcera un discours qui fera date dans l’Histoire…

26 juin 1963

LE CONTEXTE

26 juin 1963 : Nous sommes en Allemagne, à Berlin précisément, alors centre névralgique d’une division continentale. La Guerre froide règne sur l’Europe depuis presque 18 ans. Les dissensions entre les États-Unis et l’Union soviétique ne font que croître depuis la fin de la Seconde guerre mondiale, entraînant ainsi la constitution de deux blocs. L’Allemagne ayant été divisée en quatre à l’issue de la guerre, sa gestion est répartie entre américains, soviétiques, britanniques et français.

Il en va de même pour Berlin qui se trouve également divisée en quatre.

Allemagne (1945-1949)

Berlin (1945-1989)

Dans le but de répondre à l’accroissement de l’influence soviétique à l’est du rideau de fer, les trois alliés que sont les américains, les britanniques et les français décident de constituer un État souverain ouest-allemand en 1948. Cette décision provoque un premier blocus de la part de l’URSS (Union des Républiques Socialistes Soviétiques), les obligeant à instaurer un pont aérien. Le blocus durera 11 mois mais sera levé par Staline faute de véritable impact.

Cependant, le 23 mai 1949, la RFA (1) est constituée à l’ouest et le 7 octobre de la même année, c’est au tour de la RDA d’être créée, provoquant la division pleine et entière de l’Allemagne.

Une dizaine d’années après cet événement (fin de l’année 1958), de nouvelles tensions sont observées dans la ville de Berlin. Le dirigeant soviétique Nikita Sergueïevitch Khrouchtchev provoque la colère du bloc de l’ouest en désirant faire de Berlin une ville libre, démilitarisée et dont la gestion administrative serait assurée en son nom propre. Il ne semble pas opportun aux américains, dirigés par John Fitzgerald Kennedy, de donner suite à cette demande, étant entendu que Berlin demeure enclavée au milieu du territoire soviétique que constitue la RDA. Les dissensions ne cessant de s’accentuer pendant plus de 2 ans, le dirigeant russe décide de fermer les frontières entre les deux parties de Berlin et entre Berlin-ouest et la RDA. S’ensuit dans la nuit du 12 au 13 août 1961 le début de l’édification du mur de Berlin et la coupure des routes et voies ferrées.

Discours de John Fitzgerald Kennedy

Discours Ich bin ein berliner prononcé par J. F. Kennedy le 26 juin 1963

C’est dans ce contexte incertain que John Fitzgerald Kennedy se rend le 26 juin 1963 à Berlin-ouest afin de témoigner aux habitants tout le soutien que leur manifeste les États-Unis dans ce climat de tensions et d’appréhensions permanentes. Il s’exprime de l’Hôtel de ville de Schöneberg, siège de la municipalité de Berlin-ouest.

Discours intégral

« Je suis fier de venir dans cette ville comme invité de votre distingué Maire, qui symbolise dans le monde entier l’esprit combattif de Berlin Ouest. Et je suis fier de visiter la République fédérale avec votre distingué Chancelier qui a depuis tant d’années engagé l’Allemagne dans la démocratie, la liberté et le progrès, et de venir ici en compagnie de mon compatriote américain le Général Clay, qui fut dans cette ville durant ses pires moments de crise et reviendra s’il en était un jour besoin.

Il y a deux mille ans, la fierté suprême était de dire : « civis Romanum sum ». Aujourd’hui, dans le monde de la liberté, la fierté suprême est de dire : « Ich bin ein Berliner ».

Je remercie mon interprète d’avoir traduit mon allemand !

Il est beaucoup de personnes dans le monde qui ne comprennent vraiment pas, ou disent qu’ils ne comprennent pas, où se situe le problème entre le monde libre et le monde communiste. Qu’ils viennent à Berlin. Il y en a qui disent que le communisme est la vague du futur. Qu’ils viennent à Berlin. Et il y en qui disent qu’en Europe et ailleurs nous pouvons travailler avec les communistes. Qu’ils viennent à Berlin. Et il y en a même quelques-uns qui disent qu’il est vrai que le communisme est un mauvais système mais qu’il nous permet de faire des progrès économiques. Lass’ sie nach Berlin kommen. Qu’ils viennent à Berlin.

La liberté rencontre de nombreux obstacles et la démocratie n’est pas parfaite, mais nous n’avons jamais dû monter un mur pour garder notre peuple, pour les empêcher de nous quitter. Je veux dire au nom de mes compatriotes qui vivent à beaucoup de kilomètres d’ici de l’autre côté de l’Atlantique, qui sont très loin de vous, que c’est avec la plus grande fierté qu’ils ont pu partager avec vous, même à distance, l’histoire des 18 dernières années. Je ne connais pas d’autre ville, petite ou grande, qui ait été assiégée pendant 18 ans et qui vive encore avec la vitalité et la force, l’espoir et la détermination de la ville de Berlin. Même si le mur est la démonstration la plus évidente et la plus éclatante des échecs du système communiste, nous n’en tirons aucune satisfaction car il n’est, comme l’a dit votre Maire, pas seulement un crime contre l’Histoire mais un crime contre l’Humanité qui désunit les familles, sépare maris et femmes, frères et sœurs, et divise un peuple qui désire être unifié.

Ce qui est vrai de cette ville est vrai pour l’Allemagne – une vraie paix durable en Europe ne peut être assurée tant qu’un Allemand sur quatre est privé du droit élémentaire des hommes libres, celui de faire librement ses choix. En 18 ans de paix et de confiance, la présente génération allemande a mérité le droit d’être libre, ainsi que le droit à la réunification de ses familles et de sa nation pacifiquement et durablement. Vous vivez sur un îlot de liberté mais votre vie est liée au sort du continent. Je vous demande donc de regarder par-dessus les dangers d’aujourd’hui vers les espoirs de demain, de ne pas penser seulement à votre ville et à votre patrie allemande, mais d’axer votre pensée sur le progrès de la liberté dans le monde entier. Ne voyez pas le mur, envisagez le jour où éclatera la paix, une paix juste.

La liberté est indivisible et, tant qu’un seul homme se trouvera en esclavage, tous les autres ne peuvent être considérés comme libres. Mais quand tous les hommes seront libres, nous pourrons attendre en toute confiance le jour où cette ville de Berlin sera réunifiée et où le grand continent européen rayonnera pacifiquement. La population de Berlin-Ouest peut être certaine qu’elle a tenu bon pour la bonne cause sur le front de la liberté pendant une vingtaine d’années.

Tous les hommes libres, où qu’ils vivent, sont citoyens de cette ville de Berlin-Ouest, et pour cette raison, en ma qualité d’homme libre, je dis : Ich bin ein Berliner. »

(John Fitzgerald Kennedy – 26 juin 1963 – Hôtel de ville de Schöneberg).

(1) RFA : République Fédérale d’Allemagne (bloc de l’ouest).

(2) RDA : République Démocratique Allemande (bloc de l’est).

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