Le saviez-vous – Début de la Guerre de Sécession
La Guerre de Sécession (The Civil War) est le nom attribué à l’unique guerre civile que connurent les États-Unis. Elle s’étale sur quatre années (12 avril 1861 – 9 avril 1865) et provoque plusieurs centaines de milliers de morts. Ce sont deux blocs d’États faisant partie intégrante de l’État fédéral américain qui s’opposent lors de ce conflit ; les États-Unis d’Amérique (aussi appelés l’Union) situés au Nord et les États Confédérés d’Amérique (aussi appelés la Confédération) au Sud. Cette guerre qui pousse chaque partie à prendre les armes trouve ses origines dans les racines profondes de l’histoire américaine, dans les premiers instants de son existence.
Début de la Guerre de Sécession : le 12 avril 1861
Contexte économique, social et politique
Afin de comprendre les causes de ce conflit, il est nécessaire de remonter le temps et de reprendre le fil de l’Histoire à la création de cet État fédéral.
Nous sommes en octobre 1774. Le Premier Congrès Continental (1) n’ayant pu apporter de réponse quant aux modalités et à la portée d’une alliance possible face au Royaume de Grande-Bretagne, il est convenu qu’un Second Congrès Continental se réunisse en mai 1775. Cependant, la guerre se déclare le 19 avril 1775, avant même que ce dernier ne se réunisse, imposant au nouveau Congrès de prendre des mesures plus radicales. S’ensuit alors une succession de décisions qui poussent les treize colonies à déclarer leur indépendance le 4 juillet 1776. Le retour en arrière n’est alors plus possible, et c’est au terme de près de huit années de guerre que la Grande-Bretagne reconnaît officiellement l’indépendance des treize colonies d’Amérique du Nord par la signature du Traité de Paris le 3 septembre 1783.
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États et territoires des Etats-Unis d’Amérique du 7 août 1789 au 2 avril 1790
Avant même la fin de la guerre, les colonies ayant compris qu’il leur fallait s’unir politiquement pour parvenir efficacement à leurs fins, elles forment au travers une nouvelle assemblée (le Congrès de la Confédération), un État fédéral au pouvoir relativement faible. Laissant la quasi-totalité des pouvoirs à ses États membres, cette Confédération devient très vite obsolète ; le Congrès se trouvant dans la nécessité de modifier le fonctionnement interne des institutions et de remodeler une nouvelle fois la gouvernance des États-Unis.
Une convention est alors chargée d’amender les Articles de la Confédération (2).
Et c’est précisément lors du processus d’amendement de ces Articles que sera rédigée la Constitution des États-Unis d’Amérique. Mais pour que cette dernière soit applicable, il était nécessaire que les ¾ des États membres de la Confédération la ratifie.
Or, les disparités économiques entre ces différents États vont engendrer des lacunes au sein de la Constitution qui resurgiront lors de la Guerre de Sécession. En effet, il est impératif d’avoir un aperçu géographique de la situation afin de comprendre le dilemme qui va agiter les rangs de la convention chargée de rédiger ladite Constitution.
Disparités entre le Nord et le Sud
Le développement économique des treize États que comptent la Confédération ne fut pas le même. Les États du Nord se tournèrent vers un modèle industriel et capitaliste tandis que ceux du Sud s’approprièrent l’agriculture, le commerce du tabac et du coton. Tournés essentiellement sur l’extérieur et dépendants de l’exportation (notamment vers l’Europe), les États du Sud se développaient suivant le libre-échange, au contraire des États du Nord qui eux se tournaient vers un marché intérieur et se développaient suivant un certain protectionnisme.
C’est deux systèmes économiques expliquent les raisons d’une présence plus conséquente de l’esclavage dans les États du Sud, se traduisant par des besoins importants en main d’œuvre.
Ainsi, lorsque la convention réunie pour élaborer la nouvelle Constitution proposa au sein d’une clause d’abolir l’esclavage, le risque d’un refus catégorique d’une ratification de celle-ci par les États du Sud était probable. Il n’était pas question d’exacerber les divergences entre les États membres et de léser les intérêts économiques d’un nombre important d’États qui allaient composer l’État fédéral. Le but ultime recherché par les membres de la convention, ainsi que par l’ensemble du Congrès de la Confédération étant de voir cette Constitution ratifiée par les États membres, il devenait impératif de faire des concessions. Car l’approbation de cette dernière allait inverser sensiblement les pouvoirs en place et les relations entre les États membres et le gouvernement fédéral ; la Confédération étant une union d’États, l’État fédéral étant un État d’union. C’est pourquoi cette clause ne figura pas sur la version définitive de la Constitution. Néanmoins, cette divergence de vue et de modèle économique ne ferait que s’accroître jusqu’au point de rupture…
Les concessions accordées aux États du Sud va dans le sens d’une plus grande liberté sur toutes ces questions économiques, conciliant par là même leur volonté farouche de conserver un certain indépendantisme et l’idée globale de la création d’un État fédéral.
Grâce notamment à ce recul, vis-à-vis de cette clause tendant à l’abolition de l’esclavage, de la part convention, la Constitution est finalement adoptée le 17 septembre 1787 et ratifiée par l’ensemble des treize États de la Confédération. Et c’est ainsi que cette gouvernance disparaît pour laisser la place à un nouveau système politique, un État fédéral à régime Présidentiel.
La période qui précède donc la Guerre de Sécession correspond ainsi au point de jonction entre plusieurs paramètres. D’une part cette différence prépondérante de système économique, et d’autre part le climat politique. Car il est nécessaire de rappeler que cette guerre civile s’est déclenchée au sortir d’une élection présidentielle et coïncide directement avec cette dernière.
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Collège électoral lors de l’élection présidentielle de 1860
En effet, ce fut l’élection d’Abraham Lincoln à la fonction suprême en 1860 qui déclencha l’étincelle.
Car en ce 6 novembre 1860, plusieurs candidats se présentent aux suffrages indirects du peuple, au travers ses Grands Électeurs. Ils sont ainsi quatre candidats principaux :
- John Bell (Parti de l’Union Constitutionnelle)
- John Cabell Breckinridge (Parti Démocrate Sudiste (3))
- Stephen Douglas (Parti Démocrate)
- Abraham Lincoln (Parti Républicain)
Les électeurs des trente-trois États que comptent alors l’État fédéral doivent ainsi voter pour les Grands Électeurs, qui eux-mêmes se réuniront par la suite pour élire le Président des États-Unis.
Or, la population étant plus importante dans les États du Nord que dans ceux du Sud, les Grands Électeurs y étaient plus nombreux. La division des Démocrates et la prédominance du Nord en termes de Grands Électeurs provoquèrent la victoire d’Abraham Lincoln, au grand dam des États du Sud qui y voyaient une mainmise du Nord pour imposer des mesures (telles que des protections tarifaires, droits de douanes et la création d’une banque des États-Unis) contraires à leur idéologie et néfastes pour leur économie.
Candidats (Parti) | Nombre de Grands Électeurs | Nombre des votes populaires | Pourcentage des votes populaires |
---|---|---|---|
John Bell (Parti de l’Union Constitutionnelle) | 39 | 590 901 | 12,6 % |
John Cabell Breckinridge (Parti Démocrate Sudiste) | 72 | 848 019 | 18,1 % | Stephen Douglas (Parti Démocrate) | 12 | 1 380 202 | 29,5 % | Abraham Lincoln (Parti Républicain) | 180 | 1 865 908 | 39,8 % | Total | 303 | 4 685 561 | 100 % |
Prémices d’un conflit destructeur
La victoire d’Abraham Lincoln provoqua dans les semaines et mois qui suivirent la sécession d’un certain nombre d’États du Sud, et ce avant même que le Président nouvellement élu n’entre en fonction (le 4 mars 1861) :
- Caroline du Sud (20 décembre 1860)
- Mississippi (9 janvier 1861)
- Floride (10 janvier 1861)
- Alabama (11 janvier 1861)
- Géorgie (19 janvier 1861)
- Louisiane (26 janvier 1861)
- Texas (1er février 1861)
Ils formeront ainsi le 4 février 1861 les États Confédérés d’Amérique, déclarant leur indépendance et rejetant l’autorité d’Abraham Lincoln et de son prédécesseur James Buchanan (il reste Président jusqu’au 4 mars 1861, jour de l’entrée en fonction de Lincoln).
S’emparant des installations militaires et navales de l’État fédéral situées sur leurs territoires, les États Confédérés poussent Abraham Lincoln et le gouvernement fédéral des États-Unis à mobiliser et à déployer des troupes dans la perspective de mettre un terme à cette sécession. Ces mesures provoquent le départ de quatre nouveaux États qui partent rejoindre les États Confédérés :
- Virginie (17 avril 1861)
- Arkansas (6 mai 1861)
- Tennessee (7 mai 1861)
- Caroline du Nord (20 mai 1861)
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La Guerre de Sécession débute véritablement le 12 avril 1861, date à laquelle les États Confédérés décident de prendre le Fort Sumter situé à l’entrée de la baie de Charleston en Caroline du Sud et occupé par les troupes fédérales. La course contre la montre est lancée puisque la flotte fédérale est sur le point de venir secourir le fort. Après trente-quatre heures de bombardements, les troupes fédérales, au nombre de quatre-vingt soldats, capitulent et laissent le fort aux confédérés (cinq cent soldats environ). Il n’y eu lors de cette bataille aucune victime. Il s’agissait principalement d’une bataille d’ordre symbolique, mais qui toutefois entraîne l’entrée des deux factions dans une guerre fratricide qui causera d’énormes pertes humaines.
La Guerre de Sécession s’achèvera près de quatre plus tard, le 9 avril 1865, quelques jours seulement avant l’assassinat du Président Abraham Lincoln.
Elle marqua durablement les esprits et est aujourd’hui considérée comme la première guerre moderne, idéologique et totale. Elle permettra néanmoins l’abolition de l’esclavage aux États-Unis (par l’adoption du XIIIème amendement à la Constitution le 6 décembre 1865) et renforcera le fédéralisme américain.
(1) Premier Congrès Continental : assemblée composée de délégués des treize colonies d’Amérique du Nord réunie dans le but de décider de l’avenir de ces dernières ; notamment pour ce qui concerne les relations avec la Grande-Bretagne (réconciliation ou rupture) et l’alliance envisagée entre ces colonies. En effet, à cette période, les tensions entre les colonies britanniques d’Amérique du Nord et la couronne anglaise sont des plus tendues, engendrant des prémices d’indépendantisme.
(2) Articles de la Confédération : Constitution rudimentaire qui encadrait et réglementait cette Confédération.
(3) John Cabell Breckinridge (Parti Démocrate Sudiste) : la convention nationale du Parti Démocrate (instance nationale chargée de choisir son candidat pour l’élection présidentielle) s’est divisée sur la question de l’esclavage (opposition entre les Démocrates des États du Nord et ceux des États du Sud) dans le programme présidentiel. Il fut donc d’autant plus difficile de départager les sept candidats qui se présentaient et d’accorder les ⅔ des voix à l’un d’entre eux. C’est ainsi que les dissensions internes provoquèrent la scission des Démocrates ; 110 des Démocrates des États du Sud décidèrent de choisir leur propre candidat. C’est ainsi que Stephen Douglas se trouva investi par le Parti Démocrate et John Cabell Breckinridge le fut par le Parti Démocrate Sudiste.